Chroniques

Des chiffres et des êtres (centième émission)

Vous l’avez compris, c’est la centième émission de Pas Plus Haut que le Bord, c’est un grand moment d’émotion qui fait battre nos petits chroniqueurs serrés, dont le goût de l’égo n’a d’égal que ma gaule en agape, c’est un moment de jouissance pour nous et notre orgueil. Oui, mais dans notre autosatisfaction suffisante et nos espagnoles branlettes sur les seins de Narcisse, nous sommes nous vraiment demandé si cela pouvait intéresser d’autres que nous, la centième ?

Délaissant les pastèques de la susdite bulbeuse maculée de mes sentiments les plus vaniteux dont je me suis enfin libéré d’un don d’orgasme généreux, dans cette lucidité tout fraîche, je me dis alors que oui. Oui, la centième, cela pouvait vous intéresser. 100, 50, 75, 12, 5, la quine est bonne et vous repartez avec un demi-cochon vivant, madame, comme vous êtes heureuse n’est-ce pas ?

Et oui, elle est joyeuse comme une première robe de printemps avant de la vêtir, il est enjoué comme une dernière bière de mars avant de la vomir. Les gens sont ainsi, ils aiment qu’on leur parle en nombre qui font ombre à l’essentiel.

J’ai des exemples :

Cahuzac détourne 600.000, Holland, se sent molle. Mais il a compris le bougre. Ce que veut le peuple, en plus du pain, un toit décent et du travail, ce sont des chiffres. Ça nous soulage des chiffres, ça nous parle et nous donne un repère. Alors on nous en donne. On aurait pu leur demander de faire des phrases, à nos ministres, de nous prêter serment sur l’honneur, sur leurs enfants et sur leurs femmes de ménage, qu’ils n’ont jamais volé l’état, jamais menti et que s’ils font de la politique ce n’est que par conviction humaniste, philanthropie charitable et compassion bienfaisante. Non, on leur demande combien tu as de vélo. Enfin, combien tu peux dire que tu en as sans te faire choper. Et les gens kiffent à 63 % ! Même si 70 % des mêmes français ne font plus confiance aux politiques en comprenant, enfin !, que seule une règle de trois anime nos élus pour atteindre ce niveau-là de la compétition. Pouvoir, Argent, Sexe mais reste à savoir dans quel ordre : Veulent-ils le pouvoir parce qu’il attire l’argent et que sans lui ils n’auraient jamais du sexe, veulent-ils l’argent parce qu’il attire le sexe et que sans lui ils n’auraient jamais du pouvoir ou désirent-ils le sexe parce qu’il attire le pouvoir et que sans lui ils n’auraient jamais d’argent ?

Mais dans le foot c’est pareil. On les laisse manipuler des chiffres, on devrait pas. Prenez cette taxe de 75 % que devront payer notamment ces pauvres footballeurs professionnels et contre laquelle ces malheureux s’insurgent parce qu’ils seront obligés de partir à l’étranger pour gagner décemment leur vie. Et bien qu’ils se cassent, il ne s’agirait pas là de la plus grande fuite de cerveau face à laquelle on aurait à survivre. Vous en voulez du chiffre ? J’ai calculé, sur la pelouse de Barcelone, mercredi dernier, le salaire total des onze joueurs du PSG + l’entraîneur, David Beau gosse non compris, s’élevait à près de 5 millions d’euros mensuel, soit 416,000 par tête, par mois. Et ces enculés qui font battre le cœur des gens à coup de frappes de 30 mètres légèrement à côté de la transversale se permettent de se rouler par terre en pleurant très fort dès qu’il s’agit de jouer collectif. Pourquoi leur demande-t-on un avis sur la question ? Mais fais mumuse et ferme ta gueule, Zlatan, surtout quand de notre langue on ne maîtrise que le conditionnel moins que parfait à coup de  « Oui, je crois que bon, si on aurait gagné, on aurait pu ne pas perdre ».

À chacun son job, zut !

Demande-t-on à un prof de français de faire le 200 mètres en moins de 20 secondes ?

Demande-t-on à Rocco Siffredi de faire 30 centimètres dans plus de 200 fécondes ?

A chacun son zob, jute !!!

Et cette dictature du chiffre nous gangrène, partout, tous les jours : Tenez, aujourd’hui s’ouvre le procès des prothèses PIP, tout cela parce que des femmes croient encore que pour sortir de l’anonymat, il faut rentrer dans du 34 et soutenir du 95. Connerie ! À Boston, on compte les morts, à la météo on se demande combien il va faire, des poulets chinois nous refile un virus H7N9, un 737 qui se crache à Bali, c’est ballot, Frigide Barjot se frite avec Karl Zéro, on nous parle encore de François 1er, Marine de mes deux, 3 morts à Boston, les 4 saisons, 5 fruits et légumes par jour, Aristote Onassis, la loi evin, Emile et images, merde aux chiffres à la fin, nous sommes cernés !!!

Vous en voulez encore des chiffres à la con : c’est la 100e émission, c’est ma 63e chronique dans lesquelles j’ai prononcé 3 fois le mot amour, 5 fois le mot solidarité et 93 fois le mot « bite », bite, bite, bite, bite, bite, bite, ça fait maintenant 100, je suis à jour, il en reste un peu, je vous la mets ? 30 centimètres moi aussi quand elle n’est pas en redressement productif, qui s’en soucie vraiment, et surtout, qui irait vérifier ?

Nous n’avancerons pas tant que le quantitatif primera sur le qualitatif. Je suis POUR l’abolition du chiffre ! POUR un monde où le « comment » remplacera tous les « combien » et où on dirait plutôt : « Vous en voulez comment des œufs ? », « comment il te reste de jours à travailler », « comment ça coûte »,« C’est comment la pipe ? »

Et on ne dirait plus que c’est la centième émission de pas plus haut que le bord, mais que c’est la plus belle parce que nous sommes tous ensemble et que la valeur n’attend pas le nombre des années loin de ce triste monde (MUSIQUE) où l’on chiffre les êtres et l’on défriche les lettres. Pas mieux.

Musique = Générique chiffres et des lettres.

 

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